L’orge - L’orge malté ou le malt (choisir les variétés : les EBC, la densité de fin de brassage, déterminer les quantités)
Le malt est l’ingrédient majeur après l’eau, bien qu’il ne soit pas le seul déterminant. Son utilité dans le brassage est multiple, il apporter du corps, des sucres fermentescibles, des sucres complexes, des acides aminés ainsi que d’autres nutriments pour les levures, du goût et de la couleur.
Comme l’indique le nom de cette section, le malt utilisé en brasserie est de l’orge malté. Le terme de malt est usuellement utilisé pour désigner le malt d’orge. Il s’agit d’une erreur de langage puisque n’importe quelles céréale peut être maltée. L’orge est la céréale la plus utilisée pour la fabrication de la bière parce qu’il germe facilement et, une fois germé, il est très riche en enzymes et possède un rapport hydrates de carbone/matières azotées bien équilibré pour à la fois produire assez de sucre pendant le brassage (hydrates de carbone, les sucres) et comporter assez de matières indispensables pour le métabolisme des levures (matières azotées, les acides aminées). De plus, il ne contient aucun élément nuisible à la bière. Il existe des variétés à 2 et 6 rangs, c’est celle à 2 rangs qui est la plus utilisée en brasserie. Il existe aussi des variétés qui sont issues de croisements et de modifications comme pour le Nevada ou le Volga.
Pour savoir en quoi consiste le maltage de l’orge, reportez vous à la section « Maltage ». Tous les malts d’un même type mais venant de différentes malteries sont différents. Cependant, la stabilité des procédés de fabrication est assez grande que pour pourvoir décrire chaque variété de façon générale. Une liste des malts commercialisés se trouve en annexe. Beaucoup de brasseurs utilisent aussi des céréales non maltées qui constituent parfois une part importante de la recette. Celles ci sont abordées plus bas.
Comment choisir les variétés de malt ?
Les EBC.
Un EBC est une mesure de l’intensité du touraillage pendant le maltage. C’est donc à la fois une indication sur la couleur et sur la force du goût qui sera développé par le malt. Les EBC vont de 3 pour un malt de base léger à 1400 pour un malt torréfié fort. Il faut absolument que les malts de base comptent pour un minimum de 60-70% pour que la bière soit réussie. Des proportions inférieures ne donneraient pas assez de sucre et d’enzymes. Les enzymes sont détruites par les hautes températures nécessaires au touraillage des malts à EBC importants. La faible concentration en sucre dans les malts foncés vient aussi de la température élevée du touraillage qui dénature l’amidon. Au plus le malt est touraillé au moins son amidon est utilisable et au plus les enzymes sont détruites. Hors, ces deux acteurs sont indispensables à la bière en fabrication. Les EBC sont surtout d’une aide précieuse pour établir les pourcentages de la recette sur papier. Cette indication permet d’évaluer l’impact des différents malts sans pour autant les avoir déjà brassé. Utiliser uniquement des malts ayant des EBC entre 3 et 50 donnera une bière légère. Vous pouvez corser le tout en ajoutant des malts plus forts, mais avec parcimonie. Concevoir une recette n’est pas l’étape la plus simple de toutes. Il y a peu de calculs et aucune méthode fixe. Le plus sûr est de vos inspirer d’une recette déjà existante pour la modifier ensuite. Vous pouvez aussi vous appuyer sur la section « Styles de bières et comment les brasser » que nous avons réalisé pour vous aider dans l ’élaboration des proportions.
La densité du moût en fin de brassage
C’est la densité du moût à la fin du brassage. C’est une mesure quantitative des matières fermentescibles par les levures dans le moût (sucres). Différentes densités produiront des bières différentes. Au plus celle ci augmente au plus au plus votre bière sera forte en goût et en alcool.
Comment déterminer les quantités de malt à utiliser ?
Il existe une petite série de calculs clairs et relativement précis qui vous permettront de déterminer le poids de chaque malt que vous utilisez. Les unités sont le GU pour la densité, le pound pour le poids et le gallon pour le volume. La dernière étape vous permet de faire la conversion pound vers kg.
1) Déterminez la densité de votre moût en fin de brassage. Cette densité dépends du taux d’alcool que vous voulez dans votre bière. Au plus la densité du moût est élevée au plus la quantité de sucre par gallon est élevée à la mise en fermentation, au plus les levures auront du sucre à transformer en alcool. Le taux d’alcool est donc directement lié à la densité du moût mis en fermentation. Il existe un lien direct entre GU et densité : une densité de 1.050 équivaut à 50 GU. A l’aide du tableau ci dessous, vous pouvez maintenant déterminer le nombre de GU que vous voulez dans votre bière. Par exemple, si vous voulez une bière de 6,6% d’alcool, vous devrez avoir 50 GU par gallon de moût.
Remarque : Alcool potentiel signifie que le taux d’alcool correspondant à la densité initiale ne sera en aucun cas atteint puisqu’il faudrait alors une atténuation (consommation des sucres par la levure) de 100% pendant la fermentation, ce n’est ni possible ni souhaitable. Pour prendre un exemple, la Rochefort 10 a une densité initiale de 1.100. Son taux d’alcool potentiel est de 13,2° alors que son taux effectif n’est que de 11,6°. Toute la « densité non fermentée » reste dans la bière, ce sont les sucres non fermentescibles, les dextrines. Nous verrons plus loin que le taux de dextrines présents dans la bière dépends du brassage et de la souche de levure utilisée et que cela a un impact important sur les caractéristiques de votre bière. Vous avez donc intérêt à augmenter un peu le taux d’alcool par rapport à ce que vous voulez effectivement. Si vous voulez calculer cela avec exactitude, multipliez le GU correspondant au taux d’alcool voulu par le pourcentage d’atténuation de votre souche de levure et adaptez le GU théorique en fonction. Autrement dit, si vous voulez un taux d’alcool de 5° et que votre souche de levure atténue à 85%, vous devrez viser un GU de 47 car 47 x 0,85 = 40.
2) Déterminez votre volume. Nous parlons ici du volume finale, c’est à dire celui qui sera mis en fermentation. Cela signifie que ce volume doit être inférieur à celui de votre cuve de brassage puisque vous aurez besoin d’environ 30 litres durant le brassage pour mettre 21 litres en fermentation. Cette perte d’eau est due à l’évaporation durant le brassage et l’ébullition mais aussi aux drêches qui absorbent une partie de l’eau de rinçage. Comptez donc environ un tiers d’eau en moins au final (volume à utiliser dans la formule qui suit). Une fois que vous avez ce volume finale, vous devez le convertir en gallon puisque l’unité de volume est ici le gallon étasunien qui vaut 3,78 litres.
3) Déterminer le nombre totale de GU. Pour cela, il suffit de faire intervenir le volume final de bière que vous allez obtenir (étape précédente).
Reprenons l’exemple d’une bière de 6,6% d’alcool et donc à 50 GU/gallon. Disons que votre volume final (dans le fermenteur) est de 30l, soit 7,9 gallons. Vous devez donc faire le calcul suivant : 7,9 x 50 = 395 GU au total.
4) Déterminer le pourcentage de chaque malt utilisé. C’est dans ces proportions que réside une partie du secret d’une bière. Les styles différents sont tous liés, entre autre, à des proportions et à des variétés différentes. Pour avoir une idée plus précise, allez jeter un oeil dans "Styles de bières". Vous aurez une idée des grilles de base pour brasser une Stout, une Pilsener ou encore une Barley Wine, une Blanche ou une Bitter. C’est donc une étape qui demande un peu d’expérience dans la combinaison des différents malts. Elle ne se règle pas à coup de calcul ou de copier coller. Vous devez vous inspirer d’une recette déjà existante pour ensuite la transformer à votre sauce. Une fois que vous avez choisi les différents types de malt et leurs pourcentage dans la recette, vous pouvez passer à l’étape suivante.
5) Calculer le GU par malt utilisé. Cette étape vous donne le nombre de GU qui devra être tiré de chaque type de malt qui compose la recette. La somme des différents GU par malt doit bien sur être équivalente au GU total.
Continuons l’exemple précédent. Le GU total de votre moût est de 395. Disons que votre recette soit la suivante : 70% de Vienna, 15% de Biscuit et 15% de Cara. Vous devez donc faire trois calculs, un pour chaque malt. Le GU du Vienna vaut 0,7 x 395 = 276,5, celui du Biscuit est de 0,15 x 395 = 59,25 et celui du Cara sera le même que celui du Biscuit puisque les proportions sont les mêmes. Vérification : 276,5 + 59,25 + 59,25 = 395.
6) Calculer le rendement de brassage. Un rendement de 100% est impossible, comme pour n’importe quelle mécanisme naturel. Le travail des ingénieurs brasseurs en industrie est entre autre de chercher à augmenter le rendement par la maîtrise technique des réactions qu’ils travaillent. Comme cela ne concerne pas les brasseurs amateurs, nous ne nous occupons pas de cela ici. Il est cependant utile de calculer votre rendement. Cela vous permet non seulement de calculer plus exactement la quantité de malt à utiliser, mais cela vous indiquera aussi si vos procédés sont bons. En effet, un rendement moyen pour un brasseur amateur se situe entre 65 et 70%. Si vous êtes bien en dessous, c’est qu’il y a un sérieux problème. Une multitude de facteurs interviennent dont les principaux sont l’age des malts et les paliers de température du brassage. Cependant, vous ne devriez avoir aucun problème si vous suivez les étapes décrites dans ce livre. Pratiquement, vous devez établir une recette sans tenir compte du rendement, prendre la densité du moût en fin de brassage et appliquer la formule suivante :
Si vous brassez pour la première fois, prenez 65% par défaut.
7) Calculer le poids de chaque malt. Comme expliqué plus haut, deux types de malts différents ont été touraillés différemment. Cela signifie donc que la quantité de sucre présente dans les grains sera différente. Ce qui nous intéresse ici, c’est de nous approcher le plus possible du taux d’alcool voulu, et donc de la densité déterminée au point 1. Pour cela, il est nécessaire de prendre en compte ces différentes composition en sucre puisque le brassage de 1 pound de Cara dans un gallon d’eau ne donnera pas la même densité que les mêmes proportions de Choco pour un même volume. C’est ce que montre le tableau ci dessous.
Il vous est maintenant presque possible d’appliquer la formule ci-dessous qui vous permettra de déterminer le poids nécessaire pour chaque variété de malt que vous utilisez. Mais il reste encore une étape à comprendre. Nous l’avons déjà fait remarquer au point 1 concernant le taux d’alcool : les données de se tableau sont basées sur un rendement proche de 100%, vous ne les atteindrez donc pas. Vous devez faire intervenir votre propre rendement qui a été calculé au point précédent. Il faut maintenant multiplier chaque valeur du tableau par votre rendement, cette étape fait partie de la formule ci dessous.
8) Convertir le résultat en kg.
Toutes ces opérations sont assez rebutantes mais c’est ainsi que vous limiterez le hasard dans vos brassages et que vous augmenterez votre compréhension de votre bière. Et puis, une fois que vous aurez fait ces calculs quelques fois, ils deviendront beaucoup moins laids.
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